Depuis de nombreuses années, le Centre de Planning Familial Soralia de Liège accueille des femmes concernées par les MGF. De la rencontre avec les femmes aux besoins parfois spécifiques est née l’envie de mettre en œuvre une approche pluridisciplinaire et structurée tant au niveau de la prise en charge que de la prévention des MGF à travers 4 axes de travail : l’accueil psycho-social sans rendez-vous, des consultations sur rendez-vous, des animations d’éducation à la vie relationnelle affective et sexuelle (EVRAS), et la sensibilisation.
Nous sommes allées à la rencontre de Céline Liurno, psychologue et sexologue clinicienne dans ce planning avec elle nous avons parlé de l’anatomie du clitoris, la santé sexuelles, l’importance de la parole aux filles à risque et aux parents, et l’importance de donner l’espace nécessaire pour libérer cette parole.
Tu travailles depuis plusieurs années avec les femmes et filles concernées par les MGF, au vu de leur besoin et demande sur quoi te focalises-tu actuellement dans l’accompagnement que tu proposes à ce public ?
Focus sur la santé sexuelle et reproductive et bien-être: le centre de planning familial comme lieu de ressources pour les femmes et filles concernée
Céline LIURNO est psychologue au Centre de planning familial Soralia Liège et au service Alternative. Un Centre de Planning Familial est un lieu où les femmes et filles concernées par les MGF peuvent venir parler librement : des relations affectives et sexuelles, de consentement, de la contraception, de la virginité, de la grossesse, de l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG), des violences, de la puberté, des règles, de la famille, des Mutilations Génitales Féminines (MGF), de l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap, de LGBTQIAP+. Plus précisément nous offrons des services divers tel le service de santé sexuelle et reproductive qui est un service de première ligne.
Concrètement, « il y a deux services vraiment qui cohabitent et qui s’articulent ; à la fois le centre de planning familial Soralia Liège qui est un service de santé sexuelle et reproductif donc c’est un service de première ligne qui s’occupe de tout ce qui concerne l’éducation à la vie relationnelle affective et sexuelle. »
Le second service AlternativeS quant à lui est un service d’accueil, d’orientation et d’accompagnement pour toute personne concernée par de la violence entre partenaires ou fondée sur le genre. En somme, c’est « un service de prévention et de prise en charge de toute violence basée sur le genre. »
Focus sur la Découverte de l’anatomie du clitoris et l’impact de l’excision
Pour une meilleure éducation sexuelle notamment sur l’organe qu’est le clitoris cible de l’excision, Céline met en relief des illustrations de clitoris comme outils de travail et de communication avec les femmes et filles concernées par l’excision afin de montrer la partie du clitoris qui été coupé. Elle offre des exemples spécifiques et des outils liés à l’anatomie du clitoris, ce qui la rend ses animations encore plus captivantes. Il s’agit là de vraiment mettre l’accent sur un sujet considéré comme tabou ou insuffisamment discuté.
« Ce qu’on utilise beaucoup comme outil par exemple ce sont des planches anatomiques de toutes sortes qui peuvent vraiment permettre de prendre conscience de la partie interne du clitoris Par exemple on utilise énormément le clitoris 3D ce qui nous permet aussi en positionnant sur la main comme ça de se rendre compte de ce qui est la partie externe et la partie interne »
« On a aussi un super outil qui permet de parler de l’IMEN, Il y a des outils en ligne aussi qui permettent de visualiser le clitoris en 3D où tout le plancher pelvien aussi ou vraiment les différentes parties de toute l’anatomie féminine ou masculine. »
Sensibilisé sur l’excision à travers l’anatomie du clitoris est pertinent dans le contexte actuel de la promotion de la santé sexuelle reproductive et de l’éducation à la vie relationnelle affective et sexuelle (EVRAS) . Cette éducation sexuelle auprès des femmes et filles concernées par l’excision permet d’une part de prendre connaissance de cet organe, de ce qui a été enlevée, d’aborder les différents types de MGF, leurs conséquences et leur impact sur la vie sexuelle. L’objectif étant de surmonter ces impacts sur la sexualité à travers l’accompagnement psychologique et sexologique bien entendu sur base des résultats d’examens approfondis.
« Ça c’est important pour les dames vraiment concernées de comprendre ce qui a été touché, ce qui n’a pas été touché et ça permet d’identifier aussi quelles sont les zones sensibles les zones douloureuses pour voir un petit peu ce qui peut être stimulé ou pas. »
Focus sur le soutient des filles et des familles : l’importance de la parole
L’un des points essentiels dans le travail d’accompagnement des filles concernées par l’excision est de donner la parole aux filles. Céline souligne également l’importance de soutenir les familles et la parentalité. Ce soutien est capital car la famille peut à certains égards subir des influences dues aux traditions, pressions communautaires et autres. A cet effet, la création d’un espace sûr pour les filles et le soutien aux familles permet à ces filles de s’exprimer librement sans contrainte et dire si possible ce qu’elles n’osent pas dire en présence des leurs.
« Et donc ces petites filles on les voit d’année en année on trouve que c’est une démarche qui n’est pas banale et donc là aussi on ouvre un espace de parole qui je pense est vraiment important qui n’est bien sûr pas du tout obligatoire mais ça permet de pouvoir aussi soutenir la famille soutenir la parentalité et entendre ces petites filles dans ce qu’elles ont à dire. »
Le travail en réseau permet de nourrir cette pratique de terrain, en effet, pour mener à bien ces consultations, il y a lieu avant tout de faire recours aux différentes ressources disponibles sur la question.
Céline pense que : « c’est très important de travailler en réseau autour de ces situations Je pense que voilà, pour chaque professionnel il existe vraiment toute une série de ressources et de possibilités de s’informer de se former et surtout d’être sensibilisés à la question.»
Focus sur l’importance de donner une voix et un soutien aux femmes victimes de violences sexuelles
Dans le processus d’accompagnement la parole occupe une très grande place. Il est important de rappeler que parler permet aux femmes concernées de se libérer et de se dire qu’elles sont écoutées sans être jugées dans un souci d’établir une certaine confiance et éliminer la peur.
À ceci Céline rajoute : « Et donc ce temps de parole avant la consultation médicale permet vraiment d’expliquer, de dédramatiser, de prendre le temps de rassurer aussi et de montrer ce fameux document le certificat médical d’excision »
Il s’agit aussi dans ces consultations de discuter avec les femmes concernées de ce qu’est l’excision en elle-même.
« On y parle de différents types et Souvent c’est quelque chose que les dames ne connaissent pas et voilà on prend le temps tout simplement d’expliquer ça et de rassurer. On se rend disponible, on met à disposition un espace de parole qui je pense est très précieux et qui facilite la prise en charge qui facilite aussi la pluridisciplinarité. »
Réfléchir à l’accueil spécifique des femmes concernées par l’excision est également une bonne pratique qui contribue à renforcer la qualité de la prévention des MGF et l’accompagnement.
« Et donc on a pensé en équipe que c’était important de réfléchir à l’accueil de ce public et à développer des services qui soient accessibles notamment des consultations psychologiques et sexologiques. »