Compte-rendu de lecture: La coupure. L’excision ou les identités douloureuses

Lecture faite par Silme Nacih, FPS, membre du Collectif Liégeois de lutte contre les MGF
Genre

Récit et analyse de la pratique

Public visé Tout public
Notions clés

Excision – Mali

imgresRéférence

Bellas Cabane Christine, 2008, La coupure. L’excision ou les identités douloureuses, La Dispute, Paris.

Situer l’auteure

Anthropologue, médecin de formation

Déterminer le sujet

Christine Bellas Cabane tente d’appréhender l’excision dans toute  sa complexité.  Cet ouvrage se fonde sur les éléments d’une enquête scientifique qu’elle définit, non pas comme un ouvrage universitaire mais plutôt comme une contribution à un débat de société.

Résumé

Pédiatre de formation, l’auteure reprend des études d’anthropologie. Depuis des années, elle s’implique dans une association de coopération au Mali en consultant dans un centre de santé. Pour son mémoire, le thème de l’excision s’impose à elle. La question de fond soulevée est : «  dans une situation d’affrontement culturel, comment pouvait-on imaginer un travail de prévention respectueux des liens familiaux ? »

Dans un Mali du 21eme siècle, elle tente de comprendre le fondement de cette coutume, les raisons et les contraintes qui peuvent expliquer sa persistance,  ainsi que les enjeux sous-jacents  à la lutte pour son abandon.

Dans un premier temps, ses investigations débutent au Mali, durant 2 mois. Elle réalise de nombreux entretiens, avec des personnes diverses, tant en milieu rural qu’urbain : sages-femmes , médecins , juristes, sages , imams , forgeronnes, des femmes revendiquant la perpétuation de la pratique, des personnes contre la pratique. Elle questionne la perception de l’excision ainsi que les raisons évoquées pour la justifier ou la combattre dans cette société. Pour ce faire, elle recueille de nombreux témoignages et s’enquière également du point de vue juridique de cette pratique . Elle tente de saisir la place de la femme et de la fille dans la société Malienne.

Dans un second temps, elle étudie la position des familles maliennes en situation de migration dans la société française via une enquête de terrain au sein de cette communauté. L’objectif qu’elle poursuit est notamment de mettre en lumière des facteurs de changement.

Elle consacre un chapitre à la réparation clitoridienne, s’appuyant sur une interview du Dr Foldès ainsi que des témoignages de femmes en demande ou ayant déjà pratiqué cette opération.

Critique

Christine Bellas Cabane nous fait voyager à travers le Mali et la France, en tentant de donner sens à ce qu’elle perçoit, comprend, entend. Elle questionne les rôles des femmes, des pères, de la famille, de la religion, du droit, de la société dans l’organisation de la société malienne.

Elle aborde le parcours migratoire et ses enjeux.

A son retour en France, elle investigue davantage la perception de la pratique en interrogeant des familles maliennes, des personnes de la communauté mais également des jeunes filles nées en France ou immigrées dès la petite enfance. Cette démarche lui permet non seulement de questionner les facteurs de changement mais également le choc des cultures et de la migration. Elle ouvre notamment une porte à réfléchir sur l’enjeu des secondes générations dans un pays d’accueil. Par exemple : une jeune fille aux études qui dans ce cadre reçoit une sensibilisation MGF. Durant celle-ci, on explique que c’est une pratique barbare, pratiquée dans certains pays d’Afrique. Elle se rend compte qu’elle provient d’un pays où l’on pratique l’excision. Elle rentre chez elle, à la hâte, questionner sa mère en demandant si elle a été excisée. La mère lui répond par l’affirmative. C’est ainsi qu’elle apprend son excision, l’ignorant jusque-là.

Le sexualité est questionnée dans son récit, notamment à son retour dans le cadre des interviews avec le gynécologue et le chirurgien en charge des personnes excisées. Elle introduit des éléments de réflexion autour de l’intégration de la norme comme représentation de la sexualité. Elle met en lumière l’attention presque exclusive jusqu’à présent portée sur les organes génitaux masculins, au détriment des femmes.

Avis personnel

J’ai apprécié ce livre car il nous emmène dans la découverte d’une autre culture, avec les lunettes d’une anthropologue. Ce récit n’a pas la prétention de détenir la vérité mais nous donne à saisir le contexte complexe dans lequel cette pratique s’inscrit.

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